Historia Universitatis Iassiensis 8, 25–66
Abstract. Les thèmes des articles publiés par Constantin Stere dans son « journal roumain indépendant » au long de la première période, qui dure jusqu’à la fin du mois de mars 1918, sont définis par les objectifs principaux de l’action politique qu’il croit nécessaire à ce moment : le remplacement – même par la voie révolutionnaire, c’est à dire ne tenant compte de la Constitution et des lois – du gouvernement dirigé par Ion I. C. Brătianu et Take Ionescu par un autre, formé des hommes politiques restés dans les territoire occupé, la conclusion de la paix séparée avec les Pouvoirs Centrales et l’entrée de la Roumanie (sous une forme quelconque) dans « le complexe économique et politique » de L’Europe Centrale, suivie, en plan intérieur, par des profondes réformes démocratiques (la réforme électorale, la réforme agraire, la réforme administrative etc.).
En conséquence, beaucoup de ses éditoriaux décrivent le sombre tableau des désastres (pertes de vies humaines, destruction des installations pétrolières, des chaussées, des chemins de fer et d’un grand nombre de villages), l’agrandis¬sement de la dette publique ; il insiste sur l’impossibilité de continuer la guerre, sans armes et sans munitions et surtout après la dissolution de l’armée russe. Un autre thème développé par C. Stere est celui des crimes commis par le gouver¬nement de I. I. C. Brătianu qui a fait entrer le pays dans la guerre à côté de l’Entente contre la politique traditionnelle du Roi Charles I, contre le pacifique sentiment général du peuple, contre l’unanimité du premier conseil de couronne, sans consulter le Parlement. Dans ce contexte il insiste sur la soi-disant trahison de la Bessarabie, « péché contre le Saint Esprit », dont « l’expiation » c’est « l’éloignement pour l’éternité de l’âme des Bessarabiens » et leur approche¬ment des Russes avec lesquels « ils vivent la Révolution ». Un élément important dans le système élaboré de C. Stere c’est la valeur supérieure de tous le points de vue de Pouvoirs Centrales et surtout de l’Allemagne. Le directeur du journal Lumina devient un vrai « advocatus » de l’Empire de Wilhelm II: ce n’est pas lui qui a déclenché la guerre, c’est lui qui lutte avec succès contre 65 pays, mais aussi qui veut sincèrement une paix juste. Il disculpe les excès de l’administration militaire allemande dans la partie occupée de la Roumanie et après la conclusion de la Paix de Bucarest, avec des importantes cessions territoriales et des clauses économiques asservissantes, il se résume à assurer que « le Roumain ne meurt pas » (« Românul nu piere »). En contrepartie, il peint les ennemis des Pouvoirs Centrales dans les plus sombres couleurs, ils souligne leur impérialisme, les dérapages vers des régimes dictatoriales etc.
En marge des interventions du président des États Unis d’Amérique, il commente leur démagogie avec une rare verve pamphlétaire (« L’immortel Elijah Pogram »). Une attention extraordinaire prête le directeur du journal Lumina à la situation de la France et surtout « l’affaire Caillaux », qui selon lui serait caractéristique pour les tendances pacifiques de plus en plus substantielles des Français. En même temps, il voit en Joseph Caillaux un « homme juste », c’est à dire un homme appartenant à la même catégorie que lui-même, un homme qui voit et prévoit très bien, qui juge en ne se laissant influencé par les autres.
L’analyse des articles publiés par C. Stere dans le journal Lumina jusqu’ à la fin du mars 1918 confirme que les accusations qu’on lui apporte après la guerre sont bien fondés.