Historia Universitatis Iassiensis 7, 51–69
Abstract. A la fin de la Deuxième Guerre Mondiale, l’Université de Iași a perdu plusieurs professeurs, exclus pour de raisons politiques, décédés ou réfugiés de la Roumanie en d’autres pays, à cause de l’instauration du régime communiste. La situation était la même à la Chaire d’Archéologie et de Préhistoire de la Faculté des Lettres et Philosophie. La réforme de l’enseignement de l’année 1948 a copié le modèle soviétique; entre autres, les anciennes chaires, basées sur la spécialisation, ont été remplacées par des cours à caractère général. Pour l’histoire sont apparus des cours d’Histoire de la Roumanie et d’Histoire universelle, pour chacune des quatre grandes périodes (ancienne, médiévale, moderne et contemporaine). Les nouvelles autorités ont solutionné le besoin de personnel pour l’enseignement d’archéologie et d’histoire ancienne à Iași par le transfert de quelques spécialistes du Musée National d’Antiquités de Bucarest, parmi lesquels le professeur Mircea Petrescu-Dîmbovița (1915-2013), qui a été chargé des disciplines d’Histoire ancienne de la Roumanie et d’Histoire de la commune primitive. Il était le disciple des professeurs Ioan Andrieșescu (le fondateur de l’archéologie préhistorique scientifique en Roumanie) et Ion Nestor (sous la direction duquel il a soutenu son doctorat en 1947. Dès son arrivée à Iași (1949), il a reçu aussi le poste de chercheur au Musée d’Antiquités de l’Université, qui a été ultérieurement encadré dans la structure de l’Institut d’Histoire de l’Académie Roumaine, récemment créé. Ainsi, son activité didactique a été étroitement entrelacée avec celles de muséologie et de recherche scientifique, parce qu’il est devenu le directeur du Musée d’Histoire de la Moldavie (la nouvelle dénomination, à partir de 1956, de l’ancien Musée d’Antiquités) et le dirigeant du Secteur d’Histoire ancienne et d’Archéologie (1953) du cadre de l’Institut d’Histoire. Le Secteur d’Archéologie et le Musée ont fonctionné ensemble jusqu’en 1968, au Palais de la Culture, ce qui a été bénéfique pour l’évolution intégrée de l’archéologie à Iași. Plusieurs activités didactiques d’archéologie se sont déroulées au Musée, où il y avait une bonne bibliothèque de spécialité, aussi bien que la possibilité de travailler directement avec des matériaux archéologiques, ce qui a attiré les étudiants vers ce domaine.
A partir de 1967, le professeur Petrescu-Dîmbovița est devenu directeur de l’Institut d’Histoire et d’Archéologie et a quitté la direction du Musée. La nouvelle situation lui a permis de joindre encore étroitement l’activité didactique et de recherche et de réaliser une ouverture vers l’archéologie d’autres pays, par des échanges intenses, de travaux scientifiques, des participations aux réunions scientifiques internationales et par l’accueil de quelques archéologues renommés à Iași (Vere Gordon Childe, Marija Gimbutas, Tatjana Passek etc.). En 1984, à l’occasion du centenaire de la découverte de la station éponyme de Cucuteni, une importante session scientifique internationale a été organisée à Iași; les commu¬nications ont été publiées dans un volume de référence, où des repré¬sentants de premier rang de la recherche archéologique et des domaines interdis¬ciplinaires de Roumanie et d’autres pays (M. Gimbutas, Olaf Höckmann, Linda Ellis, John G. Nandris, Gisele Burger) ont signé leurs contributions.
Une préoccupation permanente du professeur Petrescu-Dîmbovița a été la formation des spécialistes, nécessaires pour l’accomplissement des objectifs à longue durée qu’il envisagé: investigations archéologiques de surface intenses et permanentes sur tout le territoire de la Moldavie afin de remplir les grandes lacunes concernant le passé de cette région; exécution d’amples fouilles archéo¬logiques, par la découverte exhaustive de quelques habitats; la formation d’un dense réseau de musées en Moldavie, destinés à la recherche intensive de certaines micro zones. Au fur et à mesure, il a réussi à former des chercheurs spécialisés dans toutes les grandes périodes de la Préhistoire et Protohistoire; quelques-uns ont devenu également ses collaborateurs didactiques, à l’Université. Hormis les connaissances reçues aux cours et séminaires, ces spécialistes ont été surtout formés par trois voies principales:
A) La participation des étudiants aux travaux des chantiers archéologiques école (Trușești, Bicaz, Hlincea, Cucuteni, Erbiceni, Stoicani, Foltești etc.) et pendant l’année universitaire à des activités de laboratoire (l’étude des matériaux résultés des fouilles).
B) Le cercle scientifique des étudiants en archéologie et histoire ancienne pour qu’ils puissent faire eux-mêmes des travaux scientifiques, qui étaient ouvertement discutés et analysées dans la présence des professeurs de spécialité. L’activité du cercle a représenté un cadre important pour la formation et la sélection de futurs spécialistes.
C) Le conseil des candidats au doctorat, activité commencée dès 1964, quand le professeur Petrescu-Dîmbovița a reçu la maîtrise des doctorats à la Faculté d’Histoire de l’Université de Iași. Parmi les doctorants du Professeur il y avait non seulement des spécialistes de Iași et de Moldavie, mais aussi d’autres zones du pays. Les thèses élaborées sous la direction du Professeur ont pu ultérieurement être publiées en tant qu’études et monographies.
En 1969, par l’initiative du professeur Marin Dinu (collaborateur du professeur Petrescu-Dîmbovița), a été refondé le Séminaire d’Archéologie de l’Université (existant dans la période entre les deux guerres), ce qui a permis aux étudiants de connaître directement les matériaux archéologiques dans les heures de séminaire et de travaux pratiques. Le Séminaire a été aussi conçu comme un établissement de recherche, ayant un laboratoire de restauration et un cabinet de dessin et de photographie des pièces archéologiques. Le Séminaire fonctionne encore à cette heure dans un bâtiment monument historique. La collection archéologique du Séminaire, enrichie par les fouilles entreprises après 1990, a offert le matériel essentiel pour l’exposition Cucuteni de l’actuel Musée de l’Université.
L’enseignement des disciplines d’histoire, y compris celles d’archéologie préhistorique, était limité, jusqu’environ 1964, par l’obligation d’utiliser les manuels et les travaux soviétiques, élaborés dans la vision d’un matérialisme historique de facture dogmatique. L’accent tombait sur les facteurs écono¬miques et sociaux, alors que les aspects spirituels étaient minimalisés. Cependant, du point de vue théorique, les professeurs d’archéologie, formés entre les deux guerres, ont utilisé de suite le paradigme culturel-historique, qui mettait l’accent sur la description rigoureuse des matériaux trouvés. Après le détachement partiel de la tutelle de l’Union Soviétique au milieu de la septième décennie, l’enseignement de la Préhistoire dans les universités a gagné un nouvel esprit, qui a permis aussi l’utilisation de quelques travaux de l’archéologie occidentale, d’abord les deux traductions en roumain des livres de Gordon Childe (Man make himself; What happened in History), qui ont consolidé le paradigme culturel-historique, en éliminant une série d’axiomes dogmatiques, reprises de la littérature soviétique. Dans cette conception, ont été aussi élaborés les deux manuels universitaires du professeur Petrescu-Dîmbovița. De même, la structure curriculaire a été partiellement modifiée, par l’apparition des groupes de spécialisation : ainsi, les étudiantes ont bénéficié, en plus des cours généraux, de cours et de séminaires spéciaux, qui leur a permis de travailler avec les sources historiques et d’apprendre des modalités de les interpréter. Par exemple, des cours et des séminaires avec thèmes de préhistoire (le néolithique de la Roumanie; la culture Cucuteni; la période de transition vers l’Âge du Bronze etc.) ont été introduits pour la groupe de spécialisation en Archéologie.
À cause des relations scientifiques sporadiques et faibles avec l’Occident, les nouveautés théoriques du processualisme (New Archaeology) n’ont pas eu écho dans l’étude de la Préhistoire en Roumanie, ainsi que l’entendement des contextes dont ont résulté différents artéfacts et structures archéologiques a resté encore longtemps rien que des desiderata de la recherche archéologique roumaine. Dans cette situation, la théorie culturelle-historique, en dépit de ses limites, a eu le mérite d’apprendre aux étudiants dès lors que la présentation correcte et détaillée des situations archéologiques constatées sur le terrain et des matériaux résultés doit être à la base de quelques interprétations. Dans cet esprit ont été rédigés la plupart des rapports et monographies des archéologues de Iași, formés à l’école du Professeur Mircea Petrescu-Dîmbovița.
Une attention de plus en plus augmentée a été accordée à l’implémentation dans la recherche archéologique des méthodes utilisées par d’autres sciences, afin d’élargir les possibilités d’interprétation des découvertes. Le large spectre des domaines et des personnalités scientifiques de l’Université de Iași a permis au professeur Petrescu-Dîmbovița d’entamer quelques collaborations interdisci¬plinaires, parmi lesquelles la plus fertile a été celle déroulée avec le collectif de zoologie et anthropologie, dirigé par professeur Olga Necrasov, créatrice d’une école de paléoanthropologie et archéozoologie à Iași. Ses disciples (Maria Cristescu, Sergiu Haimovici, Maria Știrbu, Dan Botezatu et d’autres) ont été, à leur tour, formateurs de la nouvelle génération des spécialistes, qui continuent aussi à présent cette collaboration bénéfique pour les deux parts. On peut dire les mêmes choses en ce qui concerne le domaine de l’archéobotanique, où la collaboration a commencé toujours à ce temps-là, surtout par les recherches de Felicia Monah et Marin Cârciumaru. D’autres collaborations pluridisciplinaires et interdisciplinaires ont été établies avec les Facultés de Géographie-Géologie (pour l’entendement du paléo-environnement et du rôle joué par les facteurs géographiques dans la vie des communautés préhistoriques) et de Physique (surtout concernant l’application de quelques méthodes de datation absolue, comme la thermoluminescence). Petrescu-Dîmbovița, en tant que fondateur (1961) et rédacteur en chef de la revue Arheologia Moldovei, a initié dans ses pages, à partir du no. XI (1987), la rubrique „Recherches interdisciplinaires” (qui apparaît toujours), pour la promotion de l’esprit interdisciplinaire dans l’activité archéologique. La manière interdisciplinaire d’enseignement de la Préhistoire a été aussi avancée dans des cours, même par un cours spécial dédié aux méthodes modernes dans l’archéologie (professeur Attila László).
Après 1983, quand le professeur Mircea Petrescu-Dîmbovița a pris sa retraite (il est resté seulement professeur associé habilité à la direction de doctorat), les disciplines d’histoire ancienne et d’archéologie ont parcouru, jusqu’à l’année 1989, une voie descendante, en concordance avec la situation de la société roumaine de la dernière période du régime Ceaușescu. Comme partout dans l’enseignement supérieur roumain, l’embauchée de jeunes gradués et la promotion dans des universités a cessé et la spécialisation par doctorat a été réduite au minimum. Ainsi, après la retraite du professeur Marin Dinu (l’automne de l’année 1989), les disciplines d’histoire ancienne et d’archéologie restaient seulement en charge de deux professeurs (Attila László et Mihail Vasilescu), qui avaient le degré de lecteur/chargé de cours, bien qu’ils aient soutenu leur doctorat; des deux, seulement le premier avait des préoccupations archéologiques, y compris pour la Préhistoire. Les concours pour l’occupation de postes vacantes n’étant pas acceptés, le signataire de ces lignes a été transféré, au début de l’année universitaire 1989-1990, comme titulaire pour la discipline Histoire ancienne de la Roumanie.
L’effondrement du régime communiste a déclenché de même, graduel¬lement, de profonds changements dans le domaine de l’enseignement et de la recherche archéologique à l’Université de Iași. Mais, cette chose se produira dans un nouveau cadre d’organisation et législatif, par l’implication de nouvelles personnes et à des dimensions multipliées et diversifiées, ce qui nécessite une présentation à part.
En conclusion, l’étude de la Préhistoire à l’Université de Iași dans les années du régime communiste a été dominée par la personnalité du Professeur Mircea Petrescu-Dîmbovița, important représentant de l’archéologie de la Roumanie, créateur de l’école archéologique moderne à Iași et en Moldavie, qui a élevé, par son activité, la recherche archéologique de Iași à un haut niveau scientifique. Il a formé et a attiré dans la recherche archéologique des étudiants de mérite, créant une unité des forces impliquées dans le système de l’Université, de l’Académie et du Musée. En même temps, il a soutenu la recherche d’autres centres importants de Moldavie, en appuyant directement la formation de musées valeur et de quelques revues de spécialité à Piatra Neamț, Bacău, Suceava, Botoșani, Vaslui, Galați; la plupart des promoteurs locaux de ces musées ont été des archéologues et des historiens formés à l’Université de Iași. Ainsi, on a initié une manière de recherche, bien ajustée, capable, qui est restée efficace même après que Professeur Mircea Petrescu-Dîmbovița s’est retiré de l’activité didactique, et même après sa disparition.